Situation de crise : ce qu’ont montré les attentats de Paris
Que dire juste après une tragédie ? Les marques doivent-elles se précipiter dans la compassion ? Peuvent-elles se taire ?
Les attentes de Paris ont remis en lumière ce dilemme difficile qui, hélas se répète un peu trop souvent ces temps-ci.
La bonne occasion de se taire
Oubliant que le fait de prendre la parole pour une marque lors d’une situation de crise nationale ou internationale prend son origine dans le débat sur l’entreprise citoyenne né dans les années 90, et oubliant par là-même ce que « citoyen » veut dire, il y a celles qui ratent superbement la bonne occasion de se taire.
C’est bien entendu la réponse « Merci Starbucks de penser à nous pendant la crise, mais si tu pouvais payer tes impôts en France, on pourrait payer les policiers » et toutes les réponses du même genre qui ont enflammé le web, à peine le community-manager de la marque y était-il allé de son soutien sympathique.
Cet article de BFM résume bien l’histoire de bad buzz attentats qui n’est pas le premier pour la marque (elle les cumule ces derniers temps).
Plus intéressant, le vécu de ces élans d’amicale solidarité par les Français vivant à l’étranger. La solidarité des Amazon, Apple et ebay est-elle indécente se demande cette journaliste expatriée.
Reste que le plus intéressant (et le plus utile sur le sujet) est ce billet d’une marketeuse… américaine, Lisa Gerber, qui a très mal vécu certaines marques de solidarité avec la France exprimées aux Etats-Unis même et dont elle fait une excellente analyse.
Situation de crise : ce que devrait être la règle
Je traduis donc les passages les plus intéressants de son papier .
« De toute évidence, le monde a changé la façon dont chacun s’exprime. On change sa photo de profil et on s’auto-proclame expert en politique étrangère. On veut tous ajouter notre contribution, de façon plus ou moins respectueuse. Nous avons tous des questions. Il y a des déclarations de paix et de solidarité, de haine et des opinions fondées sur mauvaises informations. Il y a à peine quelques jours, quelqu’un écrivait solennellement qu’il ne s’était pas encore fait une opinion de la situation et que c’est la raison pour laquelle il n’avait encore fait aucune déclaration. Comme si tout le monde attendait celle-ci avec impatience. C’est un dentiste!
[…] Ce qui m’amène à la question de « comment une marque doit-elle mener sa communication dans une telle période de tragédie, en situation de crise. Il est difficile de se mettre en retrait et de laisser parler tout le monde sans participer à la conversation. Nous pensons qu’il est important d’émettre une déclaration. Que rester silencieux, c’est apparaître indifférent.
Je ne suis pas d’accord.
Si votre marque a vraiment une valeur ajoutée à apporter à la conversation, oui, parlez. Si vous avez un lien direct ou indirect et que vous pouvez aider ou informer, cela fait sens que vous parliez et agissiez. Si vous dites juste quelque chose parce que vous pensez que vous devriez le faire, alors stop.
Votre public n’attend pas forcément de vous retrouver derrière un hashtag. Vos prières, à supposer qu’elles soient appréciées, n’ont pas besoin de se retrouver sur Facebook.
Vous voulez montrer du respect ? Stoppez les posts prévus et /ou modifiez la programmation de votre contenu, si cela est nécessaire.
Voici un exemple de ce qu’il vaut mieux éviter de faire, en revanche :
Une marque que j’aime bien, m’a adressé cet email au lendemain des attaques parisiennes.
« Tout le bénéfice net de cette boutique bénéficiera aux victimes de la tragédie parisienne »
Va-t-on vraiment acheter des produits de luxe en pensant au « bénéfice net » de la boutique, même si cela doit aller aux victimes.
Pourquoi ne pas plutôt annoncer que l’on va donner 100% du revenu aux victimes ? Vous percevez la différence ?
Je n’ai rien contre le fait que les gens achètent des sac Louis Vuitton, mais ce message est simplement très peu ingénieux.
Mon analyse est qu’il faut juste se poser la question avant de publier quelque chose :
- Est-ce que cela sent le « on profite de la situation ? ». Est-ce que nous ne serions pas en train de chercher à tirer profit du malheur des autres ?
- Est-ce qu’on apporte de la valeur en plus ou est-ce que l’on cherche juste à attirer l’attention ?
- Est-ce que nous sommes d’une façon ou d’une autre liés à la situation et avons-nous une quelconque responsabilité à informer ou faire prendre conscience ?S’il vous plaît, n’en ajoutez pas au bruit ambiant.
Lisa Gerber
A propos de buzz marketing, avez-vous lu sur ce blog ?
Les 6 leviers du buzz qui en cachent un 7ème.
Social marketing : comment le faire faire par les autres ?
Et cet article de l’Institut du contenu :
Marketing viral : l’idée géniale d’un restaurateur israelien