Thomas Müller : la leçon de positionnement
Publié le 16 juillet 2014, mis à jour le 29 septembre 2018.
Positionnement marketing : qu’est-ce-que c’est.
Nous devons l’idée du jour à Thomas Müller, joueur de foot, un des meilleurs buteurs du monde, un de ceux à qui l’Allemagne doit son titre de championne du monde en 2014.
Cette idée est une idée de positionnement. Certes, Thomas Müller n’a aucune prétention de donner ainsi un exemple en matière de marketing. Il n’utilise pas du tout le mot. Pourtant, ce qu’il dit pour résumer son travail est un cas d’école.
On utilise la notion de « positionnement » pour définir où, dans l’espace mental des clients potentiels, doit prendre place la marque que l’on commercialise.
Quelle « position » elle doit occuper et à laquelle elle doit se tenir.
Prenons un exemple : à quoi ressemble l’espace mental des sucreries et friandises ?
Dans cet univers, Carambar occupe l’espace du bonbon sympathique, du bon copain . Certes, il a un côté un peu brut (il est un peu dur pour les dents), mais il a toujours une bonne blague à raconter. C’est pour ça et c’est comme ça qu’on l’aime.
C’est un peu le cancre du fond de la classe à côté de qui tout le monde aime bien se mettre à la récré. Et chacun de nous tient à ce que la marque Carambar conserve cette place-là.
La preuve ? Lorsqu’en mars 2013 Carambar a annoncé à la presse qu’il n’y aurait plus de blagues au dos de ses emballages, le tollé a été général. En fait la marque avait calculé son coup pour ne révéler que cette histoire de disparition des blagues n’était en fait qu’une bonne blague ….qu’à la date du 1er avril.
Mais l’émoi a été tel qu’elle a dû démentir l’info avant la date symbolique, arguant du fait que les meilleures blagues sont les plus courtes. Elle avait sous-estimé la vitesse à laquelle se ferait le buzz.
Les déçus devenaient trop nombreux. Ils risquaient de finir par trouver que la blague n’était pas bonne… et de ne plus reconnaître le style d’humour de leur copain.
Une identité qui se reconnaît facilement
Un positionnement, c’est cela : une identité qui se reconnaît facilement. Quelque chose qui fait qu’on sait que cela ne peut être que vous. Et que vous n’avez pas intérêt à modifier.
Dans le cas du bonbon bon copain, cela peut sembler une place facile à trouver (quoique, en réalité, les idées les plus évidentes sont toujours les plus complexes à mettre au point et à gérer ensuite, la preuve par le 1er avril 2013).
Dans le cas d’une entreprise ou d’un service (surtout en B2B), c’est beaucoup plus difficile.
Il suffit de visiter les sites internet d’entreprises industrielles ou de certains sites e-commerce. On se rend compte alors que la question du positionnement est bien souvent réglée de façon un peu « molle ».
« Nous sommes une entreprise dont l’ambition est d’apporter un service d’excellence à ses clients exigeants ». Qui n’a jamais lu ce genre de tarte à la crème sur les home-pages des sites de ces entreprises ?
Franchement, vous avez envie d’aller passer vos vacances avec le PDG d’une boîte qui se définit comme ça ? Cela suinte le crâne d’oeuf à cravate sombre et costume gris.
A quoi donc allez-vous le re-connaître parmi la foule de tous ceux qui disent la même chose ?
Comment allez-vous vous souvenir de son entreprise et de ses produits le jour où vous en aurez besoin ?
L’inverse exact du bon copain Carambar. Celui à qui vous pensez, même quand vous n’avez pas besoin de lui.
Le cas de figure d’un pitch
Cet exemple de phrase qui tue est en fait l’erreur classique qui consiste à confondre « slogan publicitaire » et « positionnement ». Le slogan est en général une promesse faite au client (ici la promesse de « l’excellence »).
Le positionnement, en revanche, est une définition de soi. Ce n’est pas la même chose.
La définition de « qui l’on est » vient apporter du crédit aux promesses que l’on fait. Elle explique comment on regarde les choses, comment on prend les problèmes de ses clients. La promesse est le résultat ultérieur de cette posture de départ.
La définition de « qui l’on est » peut même parfois venir compenser un défaut (la dureté du Carambar serait un vrai problème commercial si la marque n’était pas aussi sympathique; son positionnement réussit à totalement occulter ce léger défaut).
Thomas Müller se définit en un seul mot
Donner une définition de soi est donc une excellente chose. Elle sera encore plus excellente si ce positionnement s’exprime en peu de mots.
Savoir se définir en quelques mots est d’ailleurs un exercice indispensable dans le cas d’un pitch.
Ce type d’exercice est le même que celui consistant à choisir un … « positionnement ».
Ces exercices de présentation sont de plus en plus fréquents dans la vie d’un chef d’entreprise. 20 secondes pour se présenter lors de dîners de réseaux d’entreprise par ci; 1 mn d’intervention dans un événement de speed-meeting par là.
Les spécialistes du pitch conseillent de se préparer à l’exercice en présentant … précisément sa définition de soi, ou de son métier. En y intégrant sa différence.
Vous travaillez dans la sécurité informatique ? Présentez-vous comme « spécialise de la protection rapprochée des ordinateurs ».
On comprend dès lors intuitivement à la fois votre métier (la sécurité informatique) et votre façon particulière de le faire : agir comme un garde du corps, observer en permanence l’environnement, être prêt à réagir à toute menace.
Le must du must, c’est donc ce qu’a réussi à faire… ce footballeur. Il a réussi à résumer son positionnement personnel… en un seul mot !
Quel est ce mot ? Regardez la vidéo dans laquelle je résume tout.
Thomas Müller réussit donc à trouver une originalité, un « truc », une différence pour nous raconter comment il pratique son métier de …. joueur de foot !
Etiez-vous de ceux qui, comme moi, croyaient que jouer au foot, cela consistait à taper dans un ballon, en étant en outre handicapé par la règle du jeu la plus stupide de l’histoire de l’humanité : ne pas avoir droit d’utiliser ses mains ?
Et bien, grâce à Thomas Müller, nous découvrons soudain que cela a un sens. Un sens quasi philosophique.
Ce positionnement est de nature à rendre le potentiel de production de contenu gigantesque. C’est un filon inépuisable : car jouer au foot, en tout cas jouer au foot comme il le fait lui, cela devient très particulier : on va chercher à analyser et comprendre l’espace de jeu. Génial !
Adaptez ceci au cas particulier de votre entreprise.
Si vous êtes opticien, pourriez-vous devenir celui (ou celle) qui approfondit les regards ?
Si vous êtes fleuriste, celui qui soigne la mélancolie des espaces ?
Savoir se définir ainsi, c’est la toute première étape d’une stratégie de contenus.
Peut-être la plus importante.